Saccharose & tréhalose
Le saccharose est l'exemple type de disaccharide non réducteur.
Le saccharose, encore appelé sucre ordinaire ou sucre de table, est un hétérodisaccharide que l'on extrait industriellement de la betterave (Beta vulgaris) et de la canne à sucre (Saccharum officinacum). Le sirop d'érable (Acer saccharum) contient également de fortes proportions de saccharose, mélangé à du glucose et à du fructose.
Le nom systématique du saccharose est le O-β-D-Fructofuranosyl [2 \(\leftrightarrow\) 1]-α-D-glucopyranoside (voir Conventions d'écriture). Ne possédant aucun carbone anomérique libre, il n'est ni réducteur ni soumis à mutarotation (voir Liaison O-glycosidique). Son pouvoir rotatoire spécifique est \([\alpha]_D^{20}\)= +66,5°.
Complément :
Modèle moléculaire en trois dimensions (A), formule plane de Haworth (B) et représentation conformationnelle de Reeves (C).
Le saccharose est très soluble dans l'eau et cristallise très facilement (sucre cristallisé). Parmi les glucides, c'est l'un des plus sucrés au goût, après le fructose, d'où son intérêt dans l'industrie alimentaire. Il s'hydrolyse facilement en glucose et en fructose en milieu acide.
Le saccharose est hydrolysé par des invertases.
L'hydrolyse enzymatique est réalisée par deux glycosyl hydrolases: une α-glucosidase et une β-fructosidase, dont le mélange en proportions variables constitue l'invertine, ou invertase. Ces noms proviennent du fait que l'hydrolyse du saccharose s'accompagne d'un changement de signe de l'activité optique ( \([\alpha]_D^{20}\)= +66,5° avant hydrolyse et -19,9° après). En effet, le fructose libéré est fortement lévogyre ( \([\alpha]_D^{20}\) = -92,4°). On appelle aussi sucre inverti les produits d'hydrolyse du saccharose. Etant riches en fructose, ces produits cristallisent beaucoup moins facilement que le saccharose lui-même, et ils sont plus sucrés que le saccharose initial. Le miel est un sucre inverti naturel; le jabot des abeilles renferme une β-fructosidase qui transforme le saccharose.
Le saccharose est très abondant dans la nature. Chez la plupart des végétaux chlorophylliens, il représente la forme circulante du glucose entre les organes sources (où s'effectue la synthèse du glucose par photosynthèse) et les organes puits (où s'effectue le stockage des réserves glucidiques). C'est un aliment glucidique très important pour l'Homme.
De nombreux oligosaccharides dérivés du saccharose existent chez les végétaux.
Complément : Les oligosaccharides dérivés du saccharose
Les α-galactosides sont utilisés comme substances de réserves par les végétaux.
Les α-galactosides (aussi appelés galactosides du saccharose) sont des oligosaccharides naturels comprenant un ou plusieurs résidus α-D-galactosyl liés en (1-6) au reste glucose du saccharose, ou par la même liaison entre eux. Comme le saccharose dont ils dérivent, ils ne sont pas réducteurs. Les plus communs comportent de 3 à 6 résidus, mais le nombre de résidus peut aller jusqu'à 8.
α-galactosides
Cette famille d'oligosaccharides se construit par addition de résidus α-D-Galp-(1 \(\rightarrow\) 6)- au saccharose.
Le raffinose est toujours associé au saccharose dans les organes végétaux. Au cours du raffinage du sucre de betterave, il est éliminé dans un résidu appelé mélasse. Son élimination est rendue nécessaire par le fait qu'il gène la cristallisation du sucre, et pose donc des problèmes au niveau des rendements de production. De plus, beaucoup de levures ne possèdent pas l'α-galactosidase nécessaire à l'hydrolyse du raffinose. Elles ne fermentent que le fructose, laissant intact un disaccharide réducteur résiduel : le mélibiose (α-D-Galp-(1 \(\rightarrow\) 6)-D-Glcp).
Gentianose et compagnie....
L'hydrolyse du raffinose (à droite) par une β-fructosidase libère du D-fructofuranose et du mélibiose (à gauche).
Les glucides des graines et farines des légumineuses (pois, haricot, soja) contiennent tous ces α-galactosides en proportions variables, le soja en étant le plus riche. Ces substances sont indigestes pour l'homme.
D'autres oligosaccharides non réducteurs dérivent du saccharose.
Leurs noms évoquent les végétaux où ils ont été caractérisés : plantéose, mélézitose, umbelliferose, gentianose...Ils dérivent tous du saccharose par substitution d'un unique résidu glucosyl ou galactosyl en diverses positions.
L'hydrolyse du raffinose par une β-fructosidase libère du D-fructofuranose et du mélibiose.
Ces trisaccharides non réducteurs participent à la formation de molécules plus complexes. Le mélézitose est la substance sucrée (manne, miellée...) exsudée par les végétaux à la suite d'une blessure.
Le tréhalose est un autre disaccharide non réducteur.
Le nom systématique du tréhalose est le O-α-D-Glucopyranosyl [1 \(\leftrightarrow\) 1']-α-D-glucopyranoside. Comme le saccharose, il ne possède aucun carbone anomérique libre et il n'est pas soumis à mutarotation.
Complément :
Modèle moléculaire en trois dimensions (A), formule plane de Haworth (B) et représentation conformationnelle de Reeves (C).
Le tréhalose est le principal glucide circulant dans l'hémolymphe des insectes. C'est aussi un composant de certains champignons et algues. Sa digestion enzymatique est assurée par une tréhalase très spécifique, présente dans l'intestin des mammifères, chez les insectes et quelques microorganismes.