Étude de fonction (2)
Partie
Question
Montrer que la fonction \(x \mapsto x^3+2x+4,\) définie sur \(\mathbb R,\) ne s'annule pas sur l'intervalle \(I=[-1,+\infty[.\)
On considère la fonction \(f\) définie pour tout réel \(x\) de l'intervalle \(I=[-1, +\infty[\) par \(f(x) =\frac{x+2}{x^3+2x+4}.\)
Montrer que cette fonction est continue sur \(I\) et qu'elle établit une bijection de l'intervalle \(I\) sur un intervalle \(J\) que l'on précisera.
Soit \(g\) la fonction réciproque de \(f\) définie sur l'intervalle \(J.\)
a. Calculer \(g(1)\) et \(g(\frac{1}{2}).\)
b. Montrer que la fonction \(g\) est dérivable sur \(J\) sauf peut-être au point \(\frac{1}{2}.\)
Calculer la dérivée au point \(1.\)
c. Dessiner sommairement les courbes représentatives des fonctions \(f\) et \(g\) dans un repère orthonormé.
Que peut-on dire de la tangente à la courbe représentative de \(g\) au point d'abscisse \(\frac{1}{2}\)?
d. La fonction \(g\) est-elle dérivable au point \(\frac{1}{2}\)?
Aide simple
Vérifier que \(f\) est dérivable et que sa dérivée a un signe constant sauf en un point isolé.
Théorème des fonctions réciproques :
Soit \(f\) une fonction continue strictement monotone sur un intervalle \(I.\) Alors
1) \(f(I)\) est un intervalle \(J\) de même nature que \(I\) (fermé, ouvert ou semi ouvert) et ses extrémités sont les limites de\( f\) aux extrémités de \(I.\)
2) La fonction \(f\) admet une fonction réciproque définie sur \(J = f(I)\); plus précisément, \(f\) définit une bijection de l'intervalle \(I\) sur l'intervalle \(J,\) donc il existe une fonction notée \(f^{-1}~\textrm{de}~J\) dans \(I,\) telle que
\(\begin{array} {|l|}\hline x \in I\\ y = f(x) \\ \hline \end{array}~~\Leftrightarrow~~\begin{array} {|l|}\hline y \in J\\ x = f^{-1}(y) \\ \hline \end{array}\)
3) La fonction réciproque \(f^{-1}\)est continue et strictement monotone sur \(J,\) de même sens de monotonie que \(f.\)
4) De plus, si \(f\) est dérivable en un point \(x_0\) de \(I\) et si \(f'(x_0)\)est non nul, \(f^{-1}\)est dérivable au point \(y_0 = f(x_0)~\textrm{et}~(f^{-1})'(y_0) = \frac{1}{f'(x_0)} = \frac{1}{f'(f^{-1}(y_0))}.\)
Aide méthodologique
Une fonction \(f\) définie sur \(I\) est toujours une surjection sur \(f(I).\)
L'image d'un intervalle par une fonction continue est un intervalle.
Une fonction \(f\) continue sur un intervalle est injective si et seulement si elle est strictement monotone.
On peut appliquer alors le théorème dit des fonctions réciproques.
Solution détaillée
1. Soit \(h\) la fonction \(x\mapsto x^3+2x+4\)définie sur \(\mathbb R.\) La fonction polynomiale \(h\) est continue dérivable sur \(R,\) de dérivée \(h' :x\mapsto 3x^2+2.\) Cette dérivée est strictement positive, donc la fonction \(h\) est strictement croissante sur \(\mathbb R.\) Comme \(h(-1)=1,\) on en déduit que cette fonction ne s'annule pas sur l'intervalle \(I=[-1,+\infty[.\)
2. La fonction \(f\) est continue sur \(I\) comme quotient de deux fonctions continues, le dénominateur ne s'annulant pas sur \(I,\) et l'image de \(I\) par \(f\) est un intervalle.
Il suffit alors de vérifier qu'elle est strictement monotone sur \(I\) pour en conclure qu'elle établit une bijection de \(I\) sur l'intervalle \(f(I).\) (Voir la proposition sur la caractérisation de l'injectivité d'une fonction continue sur un intervalle :
Soit \(f\) une fonction continue sur un intervalle.
1. Si \(f\) est strictement monotone, alors elle est injective.
2. Si \(f\) est injective, alors elle est strictement monotone.).
La fonction \(f\) est dérivable sur \(I\) comme quotient de deux fonctions dérivables, le dénominateur ne s'annulant pas sur \(I,\) sa dérivée en tout point \(x\) de \(I\) est :
\(f'(x)=\frac{-2x^2(x+3)}{(x^3+2x+4)^2}.\)
Sur \(I,\) la fonction \(f'\)est strictement négative sauf au point isolé \(0\) où elle est nulle, donc la fonction \(f\) est strictement décroissante sur \(I.\)
Donc la fonction \(f\) est une bijection de l'intervalle \(I\) sur \(f(I).\)
Or d'après la proposition sur la nature de l'image d'un intervalle par une fonction continue strictement monotone, \(f([-1,+\infty[)=]\displaystyle \lim_{x\rightarrow+\infty}f(x),f(-1)].\)
Proposition : nature de l'image d'un intervalle par une fonction continue strictement monotone
Soit \(f\) une fonction continue et strictement monotone sur un intervalle \(I.\)
Si \(a\) et \(b\) désignent les extrémités de l'intervalle \(I\) (c'est-à-dire \(a\) ou \(b\) sont des réels ou sont les symboles \(-\infty\)ou \(+\infty)\) alors les extrémités de l'intervalle \(f(I)\)sont \(\displaystyle \lim_{x\rightarrow a}f(x)\)et \(\displaystyle \lim_{x\rightarrow b}f(x),\) (ces limites pouvant être elles-mêmes infinies).
De plus les intervalles \(I\) et \(f(I)\)sont de même nature : fermés, ouverts, ou semi-ouverts.
Or \(f(x)\)peut s'écrire, pour \(x\) non nul, \(f(x) =\frac{x(1+\frac{2}{x})}{x^3(1+\frac{2}{x^2}+\frac{4}{x^3})} = \frac{1+\frac{2}{x}}{x^2(1+\frac{2}{x^2}+\frac{4}{x^3})}.\)
Donc \(\displaystyle \lim_{x\rightarrow+\infty}f(x)=0,\) et comme \(f(-1) = 1,\) on obtient \(J=f(I)=]0, 1].\)
3.a Soit \(g\) la fonction réciproque de \(f.\) On a l'équivalence pour tout point \(a\) de \(I\) et tout point \(b\) de \(J\) : \(f(a)=b\Leftrightarrow g(b) = a.\)
D'après ce qui précède \(f(-1) = 1\)donc \(g(1)=-1.\)
Et \(g(\frac{1}{2}) = a \Leftrightarrow f(a) = \frac{1}{2},\) on doit donc résoudre \(\frac{a+2}{a^3+2a+4}=\frac{1}{2},\) on trouve \(a=0,\) donc \(g(\frac{1}{2})=0.\)
3.b La fonction \(f\) est dérivable sur l'intervalle \(I.\)
D'après le théorème des fonctions réciproques, la fonction \(g\) réciproque de la fonction \(f\) est dérivable en tout point \(y_0=f(x_0)\) tel que \(f'(x_0)\) ne soit pas nul.
Or la dérivée de \(f\) ne s'annule qu'au point \(0,\) donc \(g\) est dérivable en tout point de \(J\) distinct de \(f(0)=\frac{1}{2}\)(le théorème des fonctions réciproques ne donne pas d'information sur l'existence de la dérivée de \(g\) au point \(\frac{1}{2}).\)
Calcul de \(g'(1)\): \(g'(1)=\frac{1}{f'(g(1))} = \frac{1}{f'(-1)}=-\frac{1}{4}.\)
3.c Graphes
Remarque : Dans un repère orthonormé, la courbe représentative de \(g\) s'obtient à partir de la courbe représentative de \(f\) par symétrie par rapport à la première bissectrice.
Soient \(C_f\)et\(C_g\) les courbes représentatives respectives des fonctions \(f\) et \(g.\)
La tangente à \(C_g\)au point d'abscisse \(\frac{1}{2}\)est symétrique, par rapport à la première bissectrice, de la tangente à \(C_f\)au point d'abscisse \(g(\frac{1}{2}).\)
Comme \(g(\frac{1}{2})=0\)et comme \(f'(0)=0,\) on en déduit que la tangente à \(C_f\)au point \((0,\frac{1}{2})\)est horizontale et donc que la tangente à \(C_g\)au point \((\frac{1}{2}, 0)\)est verticale.
3.d D'après la question précédente, on peut remarquer que \(g\) n'est pas dérivable au point \(\frac{1}{2},\) car si sa dérivée existait et valait \(l,\) le coefficient directeur de la tangente à \(C_g\)au point \((\frac{1}{2}, 0)\)serait égal à \(l.\)
On peut démontrer aussi que \(g\) n'est pas dérivable au point \(\frac{1}{2}\)de la façon suivante :
Pour savoir si la dérivée de \(g\) au point \(\frac{1}{2}\)existe, on considère le rapport \(A(x)=\frac{g(x)-g(\frac{1}{2})}{x-\frac{1}{2}}\)et on cherche s'il admet une limite quand \(x\) tend vers \(\frac{1}{2}.\)
Or \(g(\frac{1}{2})=0,\) \(\frac{1}{2}=f(0),\) et \(g(x)=y\)si et seulement si \(x=f(y).\)
Alors le rapport \(A(x)\)devient \(B(y)=\frac{y-0}{f(y)-f(0)}\)soit \(B(y)=\frac{1}{\frac{f(y)-f(0)}{y}}.\)
Mais, lorsque \(x\) tend vers \(\frac{1}{2},\) \(g(x)=y\)tend vers \(g(\frac{1}{2}) = 0\)car \(g\) est continue en \(\frac{1}{2}.\)
Donc la limite de \(A(x),\) quand \(x\) tend vers \(\frac{1}{2},\) existe si et seulement si la limite de \(B(y),\) quand \(y\) tend vers \(0,\) existe.
Or \(\frac{f(y)-f(0)}{y},\) quand \(y\) tend vers \(0,\) tend vers la dérivée de \(f\) au point \(0,\) car \(f\) est dérivable en \(0,\) et \(f'(0) = 0.\)
Donc \(B(y)\)n'a pas de limite finie, quand \(y\) tend vers \(0,\) donc \(g\) n'est pas dérivable au point \(\frac{1}{2}.\)
En fait \(B(y)\)tend vers \(+\infty,\) car le rapport \(\frac{f(y)-f(0)}{y},\) qui tend vers \(0,\) est toujours positif car \(f\) est strictement croissante. On retrouve le fait que la tangente à \(C_g\)au point \((\frac{1}{2}, 0)\)est verticale.