Conditions d'observation

\(\textrm M + \textrm e^- \to \textrm M ^{+\bullet}+ 2\textrm e^-\)

L'efficacité d'une telle ionisation dépend de la différence de potentiel V existant entre le filament chauffé d'où sont issus les électrons, et la plaque positvie vers laquelle les électrons sont attirés sur l'autre face de la chambre d'ionisation. Pour des énergies de l'ordre de 20 eV, seuls sont arrachés les électrons peu associés aux noyaux, électron des paires libres, électrons p et certains électrons de valence. Pour les molécules saturées, cette énergie est parfois insuffisante. On utilise alors une énergie d'ionisation de 70 eV, qui en général permet d'arracher tout type d'électron, notamment des électrons de liaison ce qui conduit à un inconvénient (initialement) : la fragmentation des molécules. Depuis, cet aléa a été totalement positivé par la mise en place de pratiques d'élucidation structurale (souvent complémentaires des autres spectroscopies) construites sur la nature des fragments : c'est la fragmentométrie que nous développerons ultérieurement.

Retenons que la source d'ions contient des molécules neutres indociles, et des ions multiples constitués des ions moléculaires \(\textrm M^{+\bullet}\) aussi appelés ions parents et d'ions plus légers issus des fragmentations appelés ions fragments. Ces différents ions vont être accélérés et focalisés par une succession de plaques (disques troués en leurs centres) portées à des potentiels élevés de signe inverse de l'ion et donc attracteur ; une dernière plaque de moindre potentiel ayant pour rôle d'éviter “le retour» des ions ayant traversé le dispositif d'accélération et de focalisation. Les ions qui impactent sur les plaques se neutralisent en retrouvant un électron et donc leur statut de molécule ......en attente d'ionisation. À la sortie de la chambre d'ionisation, ou source, un ion de masse m et de charge \(\textrm{q = ze}\) (où \(\textrm z\) donne le nombre d'éléctrons absents, car il existe des ions multichargés) accéléré par un potentiel \(\textrm V_\textrm s\), a une vitesse v et une énergie cinétique \(\textrm E_\textrm c\) :

\(\textrm E_\textrm c = \frac{\textrm{mv}^2}{2} = \textrm{qV}_s\)

Ainsi les ions de même charge ont tous la même énergie cinétique au sortir de la source. Pour les monochargés, il apparaît que la vitesse des ions sera d'autant moins grande que les ions seront lourds. Il existe aujourd'hui, à partir de sources pulsées assurant un départ simultané pour tous les ions, un système de détection basé sur cette différence de vitesse : on mesure le temps de vol de l'ion vers le détecteur, les plus légers précédant les plus lourds. On parle de détecteur "TOF" ou "Time of flight", appareil à temps de vol. Dans notre cas, la source fonctionne en continu et donc, il est impossible d'utiliser un tel détecteur.

En appliquant un champ magnétique B perpendiculaire à la direction prise par les ions, ces derniers vont être soumis à une force F (règle des trois doigts) perpendiculaire à v et B tel que :

\(\textrm{F = qvB}\)

L'ion va décrire une trajectoire circulaire, telle que la force centrifuge équilibre la force \(\mathrm{F}\) :

\(\textrm{F = qvB =}\frac{\textrm{mv}^2}{ r}\)     d'où l'on tire

\(\textrm{m v = q B r}\)

On dit que les spectromètres de masse à champ magnétique font une analyse des ions en quantité de mouvement (\(\textrm{mv}\)). En calculant la vitesse \(\textrm v\) de l'ion à partir de l'expression de l'énergie cinétique au sortir de la source, on trouve la formule fondamentale des spectromètres à analyseur magnétique :

\(\frac{\textrm m}{\textrm q} =\frac{\textrm r^2\textrm B^2}{2 \textrm V_\textrm s}\)

Cette formule appelle plusieurs commentaires fondamentaux :

  • le premier membre , \(\mathrm{\frac{m}{q}}\), lie la masse de l'ion à sa charge, c'est cette valeur que donne un spectre de masse (abscisse) ; on rencontre aussi \(\mathrm{\frac{m}{e}}\) plus classiquement, l'interrogation se portant alors sur le nombre de charge effectif porté par un ion !

  • le second membre montre que si l'on impose une trajectoire (arc de cercle) constante, comme celle d'un tube guide de rayon \(\textrm r\), seuls les ions de rapport \(\mathrm{\frac{m}{q}}\) vérifiant l'équation ci-dessus atteindront le détecteur, pendant que les ions plus rapides (plus légers) impacteront sur la courbure intérieure du tube guide, et les moins rapides (plus lourds) impacteront sur la courbure extérieure du tube guide.

Avec un balayage régulier de la valeur de \(\textrm B\), on obtient pour chaque ion pour une valeur précise de \(\textrm B\), la trajectoire idéale de rayon \(\textrm r\) qui conduit à la détection et au comptage des ions. On peut aussi imaginer faire un balayage à partir de \(\textrm V_\textrm s\) ; cette possibilité est surtout utilisée pour changer de gamme de masse.

Ainsi un spectre de masse va proposer une statistique donnant les ions de rapport \(\mathrm{\frac{m}{z}}\) détectés et leurs importances relatives. Ces intensités sont classiquement décrites en pourcentage de l'ion le plus abondant, décrit comme étant le pic de base ou le 100 %. Les unités associées à m sont le dalton correspondant à une unité de masse atomique u.m.a ou plus rigoureusement à une u, définie comme le \(12^{\textrm{ème}}\) de la masse de l'atome de carbone 12. Un ion \(\textrm{}^{12}\textrm C^+\) a une masse de 12 u, une mole de carbone 12 à une masse de 12 g, ce qui sépare ces deux masses c'est bien entendu le nombre d‘Avogadro.

On a :\( u = \frac{1\textrm g}{6,023.10^{+23}} = 1,66.10^{-24} ~\textrm g\)

L'unité associée à \(\mathrm{\frac{m}{z}}\) est le thomson qui correspond à une u divisé par la charge d'un électron prise ici unitairement. Un électron a une charge de \(1,602.10^{-19}\) Cb

L'habitude fait que bien souvent on parle d'un ion à 43, plutôt que de dire un ion de masse 43 u (à la condition qu'il soit monochargé ! !) ou encore mieux un pic à 43 thomson ce qui laisse ouvert la possibilité d'un ion de masse double, si la charge est double, triple si la charge est triple, etc....... Attention donc à cette simplification de langage parfois risquée. Les ions dichargés ont l'occasion de nous faire part de leurs réalités, lorsqu'ils concernent des ions de masses impaires : on a alors la surprise de trouver des ions à des m/z correspondant à des valeurs demi entières (par exemple 39,5 thomson pour un ion de masse 79 u deux fois chargé). Ces demi entiers non rien à voir avec le chlore de masse atomique 37,5 g comme vous le verrez plus loin.

Les spectres de masse sont présentés sous forme de listes associant chaque ion à sa valeur en thomson et à son intensité relative. Ces deux descripteurs peuvent être aussi présentés sur des histogrammes en bâtonnets (\(\mathrm{\frac{m}{z}}\) en abscisse et le pourcentage d'intensité en ordonnée), ce qui est une présentation classique mais non nécessaire.

Exemple du spectre de masse du benzène :