Pratique de l'analyse génétique
Pour procéder à une analyse génétique correcte, comme pour toute démarche expérimentale :
la première étape consiste à formuler une hypothèse, la plus simple possible, testable expérimentalement, pour expliquer une première observation.
Exemple : soit deux souches d'un même organisme qui diffèrent par un caractère. Pour expliquer cette différence, l'hypothèse la plus simple que l'on puisse formuler et soumettre à l'épreuve de l'expérience est " les deux souches diffèrent entre elles par deux allèles d'un même gène ".
dans une seconde étape, l'hypothèse est soumise à l'épreuve de l'expérience. Pour cela, on réalise une expérience permettant de valider (ou, au contraire, d'invalider, de rejeter) l'hypothèse formulée.
Il est donc nécessaire de pouvoir prédire les résultats attendus si l'hypothèse est vérifiée. En effet, pour qu'une expérience soit concluante, il faut qu'elle soit conçue en sorte d'obtenir des résultats différents selon que l'hypothèse de départ est vérifiée ou non.
Exemple : pour tester l'hypothèse que deux souches diffèrent entre elles par deux allèles d'un même gène, on réalise un croisement entre des individus de ces deux souches.
Cas d'un organisme haploïde
Cas d'un organisme diploïde
La prédiction de l'hypothèse " les deux souches diffèrent entre elles par deux allèles d'un même gène " est la suivante :
la moitié de la descendance présentera le phénotype de l'un des parents,
alors que l'autre moitié aura le phénotype de l'autre parent.
La démonstration de cette prédiction est présentée dans le chapitre " La pratique expérimentale dans le cas des haploïdes " de la partie " Analyse génétique ".
L'analyse est facilitée si les 2 souches en cause sont homozygotes.
Cependant, c'est seulement la deuxième génération qui donnera des indications sur le nombre de gènes en cause.
Les prédictions de l'hypothèse " les deux souches diffèrent entre elles par deux allèles d'un même gène " varient selon les relations de dominance/récessivité entre les allèles en cause.
Des exemples de différents cas possibles sont traités dans le chapitre " La pratique expérimentale dans le cas des diploïdes " de la partie " Analyse génétique "
l'étape suivante comporte l'observation et l'analyse des données de l'expérience réalisée.
Si les résultats obtenus (observés) sont compatibles (aux fluctuations statistiques près) avec les résultats attendus dans le cadre de l'hypothèse formulée, celle-ci est considérée comme valable (on dira "vraie") tant que d'autres données ne la remettent pas en cause.
Par contre, si les observations ne sont pas compatibles avec les prédictions de l'hypothèse, on doit rejeter cette hypothèse et en formuler une autre, compatible avec l'ensemble des données acquises qui, si nécessaire, doit être vérifiable par d'autres expériences.
Exemple :
Cas d'un organisme haploïde
Cas d'un organisme diploïde
Après avoir réalisé le croisement entre deux souches d'un organisme haploïde différant pour un caractère (par exemple, une souche de phénotype [ade+] qui pousse sur milieu minimum alors que la croissance de l'autre souche, de phénotype [ade–] nécessite l'adjonction d'adénine à un milieu minimum), on observe le phénotype d'un certain nombre de descendants pour le caractère auquel on s'intéresse.
Supposons que l'on obtienne les résultats suivants :
\(\begin{array}{|c|c|c|c|}\hline \textrm{Nombre de} & \textrm{Croissance sur milieu } & \textrm{Croissance sur milieu } & \textrm{Phénotype déduit de }\\ \textrm{descendants} & \textrm{minimum (sans adénine)} & \textrm{minimum (avec adénine)} & \textrm{l'observation de la croissance} \\\hline326 & + & + & [ade^{+}] \\\hline294 & - & + & [ade^{-}] \\\hline\end{array}\)
Dans cette expérience, sur un total de 620 descendants, on observe 326 [\(ade^{+}\)] et 294 [\(ade^{–}\)]. Or, l'hypothèse " un couple d'allèles " prédit qu'on doit obtenir 310 [\(ade^{+}\)] et 310 [\(ade^{–}\)]. Les résultats observés dans ce cas sont compatibles avec l'hypothèse (on peut le vérifier par un test de \(Chi^{2}\) ) : une des souches parentales, la souche de phénotype [\(ade^{–}\)], est mutée dans un gène impliqué dans la biosynthèse de l'adénine que nous appellerons adei, elle a le génotype \(adei^{–}\), l'autre souche parentale, de phénotype [\(ade^{+}\)], porte un allèle sauvage, fonctionnel du même gène adei.
Le phénotype [\(ade^{+}\)] de cette souche haploïde suggère par ailleurs qu'elle porte un allèle sauvage pour tous les gènes impliqués dans la biosynthèse de l'adénine.
Par contre, si les résultats sont les suivants :
\(\begin{array}{|c|c|c|c|}\hline \textrm{Nombre de} & \textrm{Croissance sur milieu } & \textrm{Croissance sur milieu } & \textrm{Phénotype déduit de }\\ \textrm{descendants} & \textrm{minimum (sans adénine)} & \textrm{minimum (avec adénine)} & \textrm{l'observation de la croissance} \\\hline150 & + & + & [ade^{+}] \\\hline470 & - & + & [ade^{-}] \\\hline\end{array}\)
Alors, les résultats observés (150 [\(ade^{+}\)] et 470 [\(ade^{–}\)]) sont incompatibles (on peut le vérifier par un test de \(Chi^{2}\) ) avec ceux que l'on attend dans le cadre de l'hypothèse "deux allèles d'un même gène pour explique la différence entre les deux souches" (310 [\(ade^{+}\)] et 310 [\(ade^{–}\)]). Cette hypothèse ne peut être retenue, il faut en formuler une autre, la plus simple possible et voir si les prédictions auxquelles elle conduit sont compatibles avec les données de l'expériences.
Dans ce dernier cas, la nouvelle hypothèse la plus simple qui rend compte des résultats obtenus est "les deux souches en cause diffèrent par deux couples d'allèles". La souche de phénotype [\(ade^{–}\)] est un double mutant, elle porte un allèle mutant dans deux gènes différents parmi ceux qui sont impliqués dans la biosynthèse de l'adénine. Si l'on désigne les deux gènes en cause par adei et adej, la souche de phénotype [\(ade^{-}\)] a le génotype \(adei^{–}\) \(adej^{–}\). Pour sa part, la souche [\(ade^{+}\)] possède des allèles fonctionnels pour ces deux gènes, son génotype est \(adei^{+}\) \(adej^{+}\). On peut par ailleurs montrer que adei et adej sont, en l'occurrence, deux gènes indépendants génétiquement.
L'analyse est facilitée si les 2 souches en cause sont homozygotes.
Cependant, c'est seulement la deuxième génération qui donnera des indications sur le nombre de gènes en cause.
Les prédictions de l'hypothèse "les deux souches diffèrent entre elles par deux allèles d'un même gène" varient selon les relations de dominance/récessivité entre les allèles en cause.
Des exemples de différents cas possibles sont traités dans le chapitre " La pratique expérimentale dans le cas des diploïdes " de la partie " Analyse génétique "