Exemple du carbone 13
L'existence d'un couplage entre le \(\textrm{}^1\textrm H\) et le \(\textrm{}^{13}\textrm C\) est l'une des causes du succès que connait la RMN du \(\textrm{}^{13}\textrm C\).Comme nous allons le voir, ces couplages permettent d'identifier directement le nombre d'hydrogènes portés par un carbone et donc de classer le carbone observé en méthyle \(\textrm{CH}_3\textrm-\), méthylène \(\textrm{-CH}_2\textrm-\), méthyne >CH- ou carbone non porteur d'hydrogène.Une seconde potentialité résulte de la différence importante existante entre les fréquences de résonance des deux noyaux. Si on compare ces fréquences en Hertz à des longueurs en millimètres, les deux noyaux résonnent sur deux bandes de largeur de l'ordre du centimètre qui sont distantes l'une de l'autre de 75 kilomètres !Pour un champ donné de 2,35 Tesla par exemple, le \(\textrm{}^1\textrm H\) résonne à 100 MHz, le \(\textrm{}^{13}\textrm C\) résonne à 25,144 MHz. Cela signifie que compte tenu du domaine de résonance du \(\textrm{}^1\textrm H\) et du \(\textrm{}^{13}\textrm C\) (15 ppm pour le proton et 250 ppm pour le carbone), on peut intervenir sur le domaine d'un des noyaux sans perturber la résonance de l'autre. On peut donc envisager un découplage hétéronucléaire total, alors que techniquement l'équivalent est exclu entre noyaux de même nature pour lesquels on ne peut faire que des découplages partiels localisés. Voyons à quoi correspond ce découplage hétéronucléaire total.En RMN du \(\textrm{}^{13}\textrm C\) on peut obtenir un spectre dépourvu d'interaction spin spin en \(\textrm{}^1\textrm H\) et \(\textrm{}^{13}\textrm C\) par irradiation de l'ensemble des fréquences spécifiques du \(\textrm{}^1\textrm H\). Voyons comment cela se passe...
Très schématiquement, l'irradiation consiste à observer la résonance du \(\textrm{}^{13}\textrm C\)C pendant que l'on maintient en forte résonance le noyau \(\textrm{}^1\textrm H\) couplé avec le carbone. On utilise pour cela une deuxième source de radiofréquence, très puissante, qui couvre la plage de fréquence de résonance du proton \(\textrm{}^1\textrm H\). Il en ressort que le \(\textrm{}^1\textrm H\) effectue des transitions très rapides entre ses deux états de spin +\(\frac{1}{2}\) et -\(\frac{1}{2}\). De ce fait, le noyau \(\textrm{}^{13}\textrm C\) étudié ne voit plus un état de spin particulier pour le \(\textrm{}^1\textrm H\) mais une situation moyenne qui en fait est nulle puisque la transition est très rapide entre les états -\(\frac{1}{2}\) et +\(\frac{1}{2}\). Il en résulte pour l'observateur du noyau \(\textrm{}^{13}\textrm C\) une disparition du couplage avec le proton \(\textrm{}^1\textrm H\). C'est ce que l'on appelle une "double irradiation" ou un "découplage de spin". Le phénomène est aussi appelé "double résonance".
En RMN du \(\textrm{}^{13}\textrm C\) on peut également obtenir un spectre "normal" dans lequel les couplages \(\textrm{}^1J^{13}\textrm{C-}^1\textrm H\) peuvent être observés.
Notez que le signal du TMS apparaît sous forme de quadruplet...
On observe sur ce spectre la forte valeur du couplage \(\textrm{}^1J^{13}\textrm{C-}^1\textrm H\) = 125 Hz qui va conduire à des superpositions parfois inextricables de raies dans le cas de carbones couplés ayant des déplacements chimiques voisins.
Il sera possible de contourner cette difficulté d'interprétation en irradiant partiellement le domaine du proton. Cela conduit au maintien de couplages partiels dont la valeur est de l'ordre de 10% du couplage effectif.
Cette méthode réduit les superpositions de signaux mais entraîne la disparition des couplages de valeurs faibles \(\textrm{}^2J\) et ne permet pas la mesure exacte des valeurs des couplages.
Exemple de spectres :
en haut, totalement irradié... pas de couplages !
en bas, partiellement irradié. Attention, les valeurs des constantes de couplage ne sont pas significatives...
Voici le spectre obtenu si on n'avait fait aucune irradiation.
C'est plus complexe... même en couleurs !
En noir et blanc voilà ce que vous auriez dû interpréter...
Revenons à la RMN du proton \(\textrm{}^1\textrm H\).
Le couplage \(\textrm{}^1J^1\textrm{H-}^{13}\textrm C\) toujours présent en RMN du \(\textrm{}^{13}\textrm C\) (sauf découplage...) n'est pas observé systématiquement en RMN du \(\textrm{}^1\textrm H\). En fait, si le couplage \(J^1\textrm{H-}^{13}\textrm C\) est observé en RMN du \(\textrm{}^{13}\textrm C\), il devrait donc forcément (par réciprocité) être observé en RMN du \(\textrm{}^1\textrm H\). C'est en fait le cas... mais il n'est observé qu'à l'état de trace. En effet, seuls 1,1 % des carbones sont des carbone \(\textrm{}^{13}\textrm C\) et donc l'information principale collectée est celle des molécules dans lesquelles la majorité (99,9 %) des carbones sont des carbones \(\textrm{}^{12}\textrm C\)... Le spectre observé en RMN du \(\textrm{}^1\textrm H\) correspond en fait à la molécule qui contient 99,9 % de carbones \(\textrm{}^{12}\textrm C\).
Revenons à la RMN du proton \(\textrm{}^1\textrm H\). Le couplage \(\textrm{}^1J^1\textrm{H-}^{13}\textrm C\) toujours présent en RMN du \(\textrm{}^{13}\textrm C\) (sauf découplage...) n'est pas observé systématiquement en RMN du 1H. En fait, si le couplage \(J^1\textrm{H-}^{13}\textrm C\) est observé en RMN du \(\textrm{}^{13}\textrm C\), il devrait donc forcément (par réciprocité) être observé en RMN du \(\textrm{}^1\textrm H\). C'est en fait le cas... mais il n'est observé qu'à l'état de trace. En effet, seuls 1,1 % des carbones sont des carbone \(\textrm{}^{13}\textrm C\) et donc l'information principale collectée est celle des molécules dans lesquelles la majorité (99,9 %) des carbones sont des carbones \(\textrm{}^{12}\textrm C\)...
Le spectre observé en RMN du \(\textrm{}^1\textrm H\) correspond en fait à la molécule qui contient 99,9 % de carbones \(\textrm{}^{12}\textrm C\). Prenons par exemple le spectre du 1,3,5-trichlorobenzène : Les hydrogènes sont isochrones. On observe un singulet à 7 ppm. La rigueur voudrait que l'on associe ce spectre et cette isochronie uniquement au composé ne comportant que des carbones \(\textrm{}^{12}\textrm C\) puisque seule, environ, UNE molécule sur 100 possède UN \(\textrm{}^{13}\textrm C\), UNE molécule sur 10 000, DEUX \(\textrm{}^{13}\textrm C\) !
On peut cependant observer le couplage \(J^1\textrm{H-}^{13}\textrm C\) si l'on amplifie l'enregistrement du spectre. Sur le spectre amplifié, le signal principal sort du spectre et des raies satellites apparaissent de chaque coté. On observe deux petits triplets qui correspondent toujours au signal du proton \(\textrm H\) porté par un carbone \(\textrm{}^{13}\textrm C \).
Comme ce proton \(\textrm H\) voit un \(\textrm{}^{13}\textrm C\) de spin non nul, on a couplage. Son signal est un doublet. On observe une constante de couplage \(J^1\textrm{H-}^{13}\textrm C\) de 150 Hz. Voyant un \(\textrm{}^{13}\textrm C\), ce proton \(^{1}\textrm H\) n'est plus isochrone aux deux autres \(^{1}\textrm H\) situés en position méta...
Il est donc couplé à ces deux \(^{1}\textrm H\) avec un couplage \(\textrm{}^{4}\textrm{J}_{\textrm{méta}}\). Le doublet est donc détriplé. En théorie, les signaux des deux autres \(\textrm H\) sont des doublets... Le couplage \(\textrm{}^3J\) avec le \(\textrm{}^{13}\textrm C\) n'est pas observé car trop faible. Par contre, on a un couplage \(\textrm{}^{4}\textrm{J}_{\textrm{méta}}\) avec le \(\textrm H\) porté par le \(\textrm{}^{13}\textrm C\). Expérimentalement, on n'observe pas la multiplicité du signal des deux autres \(\textrm H\) car le doublet est noyé dans le large signal précédent situé à 7 ppm. Dans tous les spectres amplifiés, on verra donc ce couplage \(J^1\textrm{H-}^{13}\textrm C\). Dans ce cas, la symétrie de la molécule est partiellement rompue et il est donc possible d'observer d'autres couplages comme dans le cas du 1,3,5-trichlorobenzène.
Selon les couplages potentiels et les ruptures d'isochronie créées la multiplicité des raies satellites observées sera plus ou moins complexe. Ainsi, dans le spectre du \(\textrm{Cl}_3\textrm{C-H}\) ou chloroforme, on observe un simple doublet... avec une constante de couplage de 209 Hz.Par contre, dans le cas du spectre du benzène, l'examen des raies satellites montre deux systèmes très complexes... absolument ininterprétables au premier ordre.