Recherche des sous-espaces vectoriels stables par un endomorphisme
Durée : 30 mn
Note maximale : 15
Question
Soit \(E\) un \(\mathbf K\)-espace vectoriel de dimension 3, \(\mathbf K\) étant \(\mathbb R\) ou \(\mathbb C\), et soit \((e_1,e_2,e_3)\) une base de \(E\).
On considère l'endomorphisme \(f\) de \(E\) défini par :
\(f(e_1)=-e_1+3e_2+3e_3\)
\(f(e_2)=-2e_1+4e_2+3e_3\)
\(f(e_3)=2e_1-2e_2-e_3\)
On dit qu'un sous-espace vectoriel \(F\) de \(E\) est stable par \(f\) si l'image de tout élément de \(F\) appartient à \(F\) : \(f(F)=\subset F\).
Dans ce cas, l'application de \(F\) dans \(F\) qui à \(u\) associe \(f(u)\) est un endomorphisme de \(F\), notée \(f_{|F}\) et nommée restriction de \(f\) à \(F\).
Déterminer tous les sous-espaces vectoriels de \(E\) de dimension 1, stables par \(f\).
Soit \(F\) un sous-espace vectoriel de \(E\) de dimension 2, stable par \(f\).
Montrer que le polynôme caractéristique de \(f_{|F}\), restriction de \(f\) à \(F\), divise le polynôme caractéristique de \(f\).
En déduire que \(F\) est somme directe de deux sous-espaces propres de \(f\).
Déterminer tous les sous-espaces vectoriels de \(E\), stables par \(f\).
Solution
Soit \(G\) un sous-espace vectoriel de \(E\) stable par \(f\) et de dimension 1. Alors \(G\) est engendré par un élément \(u\), non nul. Puisque \(f(u)\) appartient à \(G\), il existe un scalaire \(\lambda\) tel que \(f(u)=\lambda u\). Donc \(u\) est un vecteur propre de \(f\).
Réciproquement, si u est un vecteur propre de \(f\), associé à la valeur propre \(\lambda\), le sous-espace vectoriel engendré par \(u\) est de dimension 1 et est stable par \(f\) :
en effet, pour tout scalaire \(\alpha\) de \(\mathbf K, f(\alpha u)=\alpha f(u)=\alpha\lambda u=(\alpha\lambda)u\).
On est donc conduit à rechercher les vecteurs propres de \(f\).
Soit \(A\) la matrice de \(f\) dans la base \((e_1,e_2,e_3)\), et \(P_{car,f}\) le polynôme caractéristique de \(f\).
\(A=\left(\begin{array}{cccc} -1&-2&2& \\ 3&4&-2 \\ 3&3&-1 \end{array}\right) \textrm{ et } P_{car,f}(X)=\left|\begin{array}{cccc}-1-X&-2&2& \\ 3&4-X&-2 \\3&3&-1-X \end{array}\right|\)
Après calculs on trouve \(P_{car,f}(X)=(-1-X)(1-X)(2-X)\).
Ce polynôme est scindé et a toutes ses racines simples, on en déduit que f est diagonalisable et que ses sous-espaces propres sont de dimension 1. Donc deux vecteurs propres associés à la même valeur propre \(\lambda\) engendrent le même sous-espace vectoriel qui est le sous-espace propre associé à \(\lambda\).
On en déduit que les seuls sous-espaces stables par \(f\) de dimension 1 sont les trois sous-espaces propres de \(f, E_{-1},E_1,E_2\), associés aux valeurs propres -1, 1 et 2.
On détermine ces trois sous-espaces :
\(xe_1+ye_2+ze_3\in E_{-1}\Leftrightarrow\left\{\begin{array}{cccccccc} &-2y&+2z&=0 \\3x&+5y&-2z&=0 \\3x&+3y&&=0\end{array}\right. \Leftrightarrow y=z=-x\)
donc \(E_{-1}=\{x(e_1-e_2-e_3),x\in\mathbf K\}.\)
\(xe_1+ye_2+ze_3\in E_1\Leftrightarrow\left\{\begin{array}{cccccccc} -2x&-2y&+2z&=0 \\3x&+3y&-2z&=0 \\3x&+3y&-2z&=0\end{array}\right. \Leftrightarrow\left\{\begin{array}{cccccccc} z&-x&-y&=0 \\&x&+y&=0\end{array}\right. \Leftrightarrow\left\{\begin{array}{cccccccc} x=-y \\z=0 \end{array}\right.\)
donc \(E_1=\{x(e_1-e_2),x\in\mathbf K\}.\)
\(xe_1+ye_2+ze_3\in E_2\Leftrightarrow\left\{\begin{array}{cccccccc} -3x&-2y&+2z&=0 \\3x&+2y&-2z&=0 \\3x&+3y&-3z&=0\end{array}\right. \Leftrightarrow\left\{\begin{array}{cccccccc} x&-y&-z&=0 \\&y&-z&=0\end{array}\right. \Leftrightarrow\left\{\begin{array}{cccccccc} x=0 \\y=z \end{array}\right.\)
donc \(E_2=\{x(e_2+e_3),x\in\mathbf K\}.\)
Remarque :
Lorsqu'un sous-espace propre a une dimension supérieure ou égale à 2, on peut construire une infinité de sous-espaces de dimension 1, stables par \(f\) :
en effet supposons que v1 et v2 sont deux vecteurs propres non colinéaires, associés à la même valeur propre \(\lambda\); pour \(\alpha\) appartenant à \(\mathbf K\), le vecteur \(v_1+\alpha v_2\) est aussi un vecteur propre de f associé à la valeur propre \(\lambda\) et le sous-espace vectoriel \(F(\alpha)\) qu'il engendre est donc de dimension 1et stable par \(f\) ; or si \(\alpha\) et \(\beta\) sont distincts, \(v_1+\alpha v_2\) et \(v_1+\beta v_2\) ne sont pas colinéaires donc les sous-espaces vectoriels \(F(\alpha)\) et \(F(\beta)\) sont distincts, de dimension 1 et stables par \(f\).
Soit \(F\) un sous-espace vectoriel de \(E\) de dimension 2, stable par \(f\).
Comme \(F\) est stable par \(f\), on peut considérer la restriction \(f_{|F}\) de \(f\) à \(F\), \(f_{|F}\) est ainsi définie : pour tout \(u\) appartenant à \(F\), \(f_{|F}(u)=f(u)\).
Soit \((u_1,u_2)\) une base de \(F\), comme \(f(u_1)\) et \(f(u_2)\) sont des combinaisons linéaires de u1 et u2, la matrice de \(f_{|F}\) dans la base \((u_1,u_2)\) est de la forme \(\left[\begin{array}{cccccccc}\alpha&\beta \\\gamma&\delta \end{array}\right)\), et le polynôme caractéristique de \(f_{|F}\) est \(P_{car,f_{|F}}(X)=\det\left(\begin{array}{cccccccc}\alpha-X&\beta \\\gamma&\delta-X \end{array}\right)\).
On peut alors compléter la base \((u_1,u_2)\) de \(F\) avec un troisième vecteur de \(E u_3\), pour obtenir une base de \(E\).
La matrice de f dans la base \((u_1,u_2,u_3)\) est donc de la forme :
\(\left(\begin{array}{cccccccc}\alpha&\beta&\epsilon \\\gamma&\delta&\phi\\ 0&0&\lambda\end{array}\right)\).
Le polynôme caractéristique de \(f\) s'écrit donc : \(P_{car,f}(X)=\det\left(\begin{array}{cccccccc}\alpha-X&\beta \\\gamma&\delta-X \end{array}\right)(\lambda-X)=(\lambda-X)P_{car,f_{|F}}(X)\).
On a bien montré ainsi que le polynôme caractéristique de \(f_{|F}\) divise le polynôme caractéristique de \(f\).
D'après la question précédente, le polynôme caractéristique de \(f_{|F}\) divise le polynôme caractéristique de \(f\), et comme ce dernier a trois racines distinctes -1, 1 et 2, on en déduit que le polynôme caractéristique de \(f_{|F}\) a deux racines distinctes et que est donc diagonalisable, donc \(F\) admet comme base deux vecteurs propres de \(f_{|F}\) associés aux deux racines du polynôme caractéristique de \(f_{|F}\).
Or les vecteurs propres de \(f_{|F}\) sont des vecteurs propres de \(f\) : en effet si \(u\) est un élément de \(F\) tel que \(f_{|F}(u)=\mu u\), alors comme \(f_{|F}(u)=f(u)\), \(u\) est un élément de \(E\) tel que \(f(u)=\mu u\).
Donc cette base de vecteurs propres de \(F\) est formée de deux vecteurs propres associés à deux valeurs propres de \(f\) distinctes ; comme chacun des sous-espaces propres de \(f\) est de dimension 1, tout vecteur propre non nul leur appartenant en forme une base.
Donc \(F\) est somme directe de deux sous-espaces propres parmi \(E_{-1},E_1,E_2\).
Les sous-espaces vectoriels de \(E\) stables par \(f\) sont donc :
{0}, sous-espace vectoriel de dimension 0,
\(E_{-1},E_1,E_2\), sous-espaces vectoriels de dimension 1,
\(E_{-1}\bigoplus E_1,E_{-1}\bigoplus E_2,E_1\bigoplus E_2\), sous-espaces vectoriels de dimensions 2,
\(E\), l'espace vectoriel de dimension 3.