Signature d'une forme quadratique
On garde les notations et hypothèses du théorème de Sylvester. En particulier l'espace vectoriel considéré est un espace vectoriel sur \(R\).
Définition : Signature d'une forme quadratique ou d'une forme bilinéaire symétrique
La signature d'une forme quadratique \(q\) (ou d'une forme bilinéaire symétrique \(f\)) est le couple d'entiers \((p,s)\) où \(p\) est le nombre de coefficients positifs dans une décomposition de \(q\) en carrés et \(s\) le nombre de coefficients négatifs.
On notera sgnq ou sgnf cette signature.
Cette définition a un sens puisque le théorème de Sylvester prouve que les deux entiers \(p\) et \(s\) et donc le couple \((p,s)\) ne dépend que de la forme quadratique \(q\) et non pas de la décomposition.
Avec les notations du théorème de Sylvester, \(p\) est le nombre d'éléments de \(I_1\), \(s\) est celui de \(I_2\).
Ils vérifient l'égalité : \(p+s=r\) où \(r\) est le rang de la forme quadratique (ou de la forme bilinéaire symétrique).
Propriété :
Soit \(q\) une forme quadratique de signature \((p,s)\) sur un R-espace vectoriel de dimension \(n\) et \(f\) sa forme polaire.
La forme quadratique \(q\) est non dégénérée si et seulement si \(p+s=n\).
On dit que \(q\) est positive (ou que \(f\) est positive) si : \(\forall x\in E, q(x)\geq 0\).
Alors \(q\) est positive si et seulement si sa signature est de la forme \((p,0)\), donc si \(s=0\).
Une forme est non dégénérée et positive si et seulement si sa signature est \((n,0)\).
Il existe une base orthonormale pour la forme quadratique si et seulement si sa signature est \((n,0)\).
Preuve :
Ce résultat découle immédiatement du fait que \(p+s=r\) et qu'une forme quadratique est non dégénérée si et seulement si elle est de rang \(n\).
Si \(s=0\), la forme est positive (immédiat).
Si \(s\) est non nul, on peut écrire la forme quadratique sous la forme \(q(x_1e_1+x_2e_2+\ldots+x_ne_n)=\alpha_1x_1^2+\ldots+\alpha_px_p^2-\alpha_{p+1}x_{p+1}^2-\ldots-\alpha_rx_r^2\). où les \(\alpha_i\) sont positifs ou nuls, avec au moins un \(\alpha_j\) (\(p\leq j\leq r\)) non nul. Alors \(q(e_1)=\alpha_1\geq 0\) et \(q(e_j)=-\alpha_j<0\). Donc \(q\) n'est pas positive.
C'est une conséquence immédiate de 1. et 2. que l'on a mis en évidence car c'est un résultat très important.
Cela résulte immédiatement des définitions.
Vocabulaire : Une forme bilinéaire symétrique non dégénérée positive est aussi appelée forme bilinéaire symétrique définie positive.
Exemple :
La forme quadratique \(q\) sur \(R^3\) définie pour tout \(x=(x_1,x_2,x_3)=x_1e_1+x_2e_2+x_3e_3\)de \(R^3\) par :
\(q(x)=x_1^2+x_2^2+x_3^2\).
Sa signature est \((3,0)\). Elle est donc non dégénérée positive.
Soit \(q\) l'application de \(R^3\) dans \(R\) définie pour tout \((x_1,x_2,x_3)\) par :
\(q(x_1,x_2,x_3)=(x_1+x_2+x_3)^2+(x_1-x_2)^2\).
Elle est déjà décomposée en carrés et sa signature est \((2,0)\). Elle est donc positive et dégénérée. Il n'existe donc pas de base orthonormale relativement à \(q\).
Soit \(q\) la forme quadratique sur \(R^3\) définie pour tout \((x_1,x_2,x_3)\) par :
\(q(x_1,x_2,x_3)=x_1^2-x_32+2x_1x_2+2x_2x_3-2x_1x_3\).
Grâce à la méthode de Gauss, on a trouvé :
\(q(x_1,x_2,x_3)=(x_1+x_2-x_3)^2-(x_2-2x_3)^2+2x_3^2\)
Alors la signature de \(q\) est \((2,1)\). Son rang est égal à 3 et elle est non dégénérée. Elle n'est pas positive. Il n'existe donc pas de base orthonormale relative à \(q\).
Soit \(\phi\) la forme quadratique sur \(R^3\) pour tout \((x_1,x_2,x_3)\) par :
\(\phi((x_1,x_2,x_3)=x_2x_3+x_1x_3\).
Grâce à la méthode de Gauss, on a trouvé :
\(\phi((x_1,x_2,x_3)=\frac14[(x_2+x_1+x_3)^2-(x_2+x_1-x_3)^2]\).
Alors la signature de \(\phi\) est \((1,1)\). Son rang est égal à 2, elle est dégénérée et n'est pas positive. Il n'existe donc pas de base orthonormale relativement à \(\phi\).
La propriété suivante concerne les formes bilinéaires symétriques positives.
Proposition : Inégalités de Cauchy-Schwarz
Soit \(f\) une forme bilinéaire symétrique positive et q la forme quadratique associée. Alors :
Pour tout \(x\) et \(y\) de \(E\),
\([f(x,y)]^2\leq f(x,y)f(y,y)\)
\(\sqrt{q(x+y)}\leq \sqrt{q(x)}+\sqrt{q(y)}\)
Le noyau de \(f\), \(E^\bot\), est égal à l'ensemble des vecteurs isotropes.
Si le seul élément isotrope est 0, c'est-à-dire si : \(\forall x\in E -\{0\}, q(x)>0\), \(f\) est non dégénérée et positive.
La deuxième inégalité est aussi appelée inégalité de Minkowski.
Preuve :
Soient \(x\) et \(y\) deux éléments quelconques de \(E\). Puisque la forme est positive, pour tout \(\lambda\) réel \(f(\lambda x+y,\lambda x+y)\geq 0\).
En développant cela donne : \(\forall \lambda\in R\), \(\lambda^2f(x,x)+2\lambda f(x,y)+f(y,y)\geq 0\).
Ceci n'est possible que si le discriminant est négatif ou nul donc si \(4[f(x,y)]^2-4f(x,x)f(y,y)\leq 0\).
D'où la première formule.
Comme \(\sqrt{f(x+y,x+y)}\)et \(\sqrt{f(x,x)}+\sqrt{f(y,y)}\) sont des réels positifs, l'inégalité \(\sqrt{f(x+y,x+y)}\leq\sqrt{f(x,x)}+\sqrt{f(y,y)}\) est équivalente à l'inégalité \(f(x+y,x+y\leq (\sqrt{f(x,x)}+\sqrt{f(y,y)})^2\). Or :
\(f(x+y,x+y)-(\sqrt{f(x,x)}+\sqrt{f(y,y)})^2=f(x,x)+f(y,y)+2f(x,y)-f(x,x)-f(y,y)-2\sqrt{f(x,x)}\sqrt{f(y,y)}\)
D'où \(f(x+y,x+y)-(\sqrt{f(x,x)}+\sqrt{f(y,y)})^2=2f(x,y)-2\sqrt{f(x,x)}\sqrt{f(y,y)}\)
Or la quantité \(f(x,y)-\sqrt{f(x,x)}\sqrt{f(y,y)}\)est négative ou nulle d'après la première inégalité. D'où le résultat.
Soit \(\Im_q\) l'ensemble des vecteurs q-isotropes.
L'inclusion \(E^\bot \subset \Im_q\) est toujours vraie. En effet, si \(x\) est un élément de \(E^\bot\), il vient : \(\forall y\in, f(x,y)=0\). En particulier si l'on prend \(y=x\) cela donne \(f(x,x)=0\) et donc \(x\) est isotrope.
Supposons \(f\) positive. Soit \(x\) un vecteur isotrope. Alors en utilisant l'inégalité de Schwarz on obtient immédiatement la propriété : \(\forall y\in E, f(x,y)=0\).
Pour terminer cette ressource donnons la définition suivante :
Définition : Espace euclidien
Soit \(E\) un R-espace vectoriel de type fini et \(f\) une forme bilinéaire symétrique non dégénérée et positive. Le couple \((E,f)\) est appelé espace euclidien.
L'étude des espaces euclidiens fait l'objet d'une autre ressource.