Application au calcul des puissances d'une matrice

La notion de matrices semblables a aussi une utilisation intéressante pour le calcul des puissances de matrices en partant du constat que plus une matrice est simple (c'est-à-dire avec beaucoup de zéros) plus le calcul est facile.

Pour s'en convaincre on peut considérer l'exemple des matrices diagonales et établir le résultat suivant

PropriétéPuissance d'une matrice diagonale

Soit \(\mathcal D=\left(\begin{array}{cccccc}\alpha_1&0&\cdots&0\\0&\alpha_2&\cdots&0\\\vdots&&&\vdots\\0&\cdots&0&\alpha_n\end{array}\right)\)

une matrice diagonale d'ordre \(n\).

Alors, pour tout entier positif \(p\), on a

\(\mathcal D^p=\left(\begin{array}{cccccc}\alpha_1^p&0&\cdots&0\\0&\alpha_2^p&\cdots&0\\\vdots&&&\vdots\\0&\cdots&0&\alpha_n^p\end{array}\right)\)

On démontre cette formule en faisant une démonstration par récurrence sur \(p\).

Comme annoncé, on va donner une formule liant les puissances de deux matrices semblables.

ThéorèmeRelation entre les puissances de deux matrices semblables

Soient \(\mathcal A\) et \(\mathcal B\) deux matrices semblables, c'est-à-dire telles qu'il existe une matrice inversible \(\mathcal P\) telle que \(\mathcal A=\mathcal P\mathcal B\mathcal P^{-1}\).

Alors pour tout entier positif \(p\), on a \(\mathcal A^p=\mathcal P\mathcal B^p\mathcal P^{-1}\), et donc \(\mathcal A^p\) et \(\mathcal B^p\) sont semblables.

On démontre encore cette formule par récurrence sur \(p\).

Si \(p=1\), la formule est triviale (c'est la formule traduisant le fait que \(\mathcal A\) et \(\mathcal B\) sont semblables). Supposons la propriété vraie pour \(p=k-1\) c'est-à-dire \(\mathcal A^{k-1}=\mathcal P\mathcal B^{k-1}\mathcal P^{-1}\) . Alors on a \(\mathcal A^k=\mathcal A^k\mathcal A=(\mathcal P\mathcal B^{k-1}\mathcal P^{-1})(\mathcal P\mathcal B\mathcal P^{-1})\) , d'où \(\mathcal{PB}^{k-1}(\mathcal P^{-1}\mathcal P)\mathcal B\mathcal P^{-1}=\mathcal P\mathcal B^{k-1}\mathcal B\mathcal P^{-1}=\mathcal P\mathcal B^k\mathcal P^{-1}\) et la propriété est vraie pour \(p=k\).

Exemple

Reprenons le premier exemple où, avec

\(\mathcal A=\left(\begin{array}{cccccc}2&1\\1&2\end{array}\right)\), \(\mathcal B=\left(\begin{array}{cccccc}1&0\\0&3\end{array}\right)\), \(\mathcal P=\left(\begin{array}{cccccc}1&1\\-1&1\end{array}\right)\)

et\( \mathcal P^{-1}=\left(\begin{array}{cccccc}\frac{1}{2}&-\frac{1}{2}\\\frac{1}{2}&\frac{1}{2}\end{array}\right)\)

on a \(\mathcal A=\mathcal P\mathcal B\mathcal P^{-1}\)

Alors, l'application du théorème donne :

\(\forall p\in\mathcal N,\mathcal A^p=\mathcal P\mathcal B^p\mathcal P^{-1}\)

soit \(\forall p\in\mathcal N,\mathcal A^p=\mathcal P\left(\begin{array}{cccccc}1&0\\0&3\end{array}\right)^p\mathcal P^{-1}\)

En appliquant la formule obtenue pour les puissances de matrices diagonales on a :

\(\forall p\in\mathcal N,\mathcal A^p=\mathcal P\left(\begin{array}{cccccc}1&0\\0&3^p\end{array}\right)\mathcal P^{-1}=\left(\begin{array}{cccccc}1&1\\-1&1\end{array}\right)\left(\begin{array}{cccccc}1&0\\0&3^p\end{array}\right)\left(\begin{array}{cccccc}\frac{1}{2}&-\frac{1}{2}\\\frac{1}{2}&\frac{1}{2}\end{array}\right)\)

d'où \(\displaystyle{\forall p\in\mathcal N,\mathcal A^p=\frac{1}{2}\left(\begin{array}{cccccc}1+3^p&-1+3^p\\-1+3^p&1+3^p\end{array}\right)}\)

Remarque

On a vu dans la ressource consacrée aux matrices carrées que l'on avait un procédé simple pour calculer les puissances d'une matrice de la forme \(\lambda\mathcal I_n+\mathcal N\) où \(\mathcal N\) est une matrice de \(\mathcal M_n(\mathbf K)\) , nilpotente.

Par conséquent on aura une méthode systématique pour calculer les puissances d'une matrice semblable à une matrice de la forme \(\lambda\mathcal I_n+\mathcal N\)\(\mathcal N\) est une matrice de \(\mathcal M_n(\mathbf K)\) , nilpotente. Ce résultat est très utile.