Introduction/motivation

Nous allons présenter quelques méthodes de calcul de la valeur approchée d'une intégrale. Les méthodes présentées sont en relation avec la construction de l'intégrale de Riemann faite dans le cours, elle-même proche de la construction historique de l'intégrale.

Il s'agit donc, dans cette partie, de décrire et d'expliquer certaines techniques d'approximation lorsque le calcul d'une intégrale est difficile ou impossible. Ces méthodes et d'une façon plus générale, les simulations numériques ont connu un formidable essor grâce à la croissance de la puissance des ordinateurs qui prennent de plus en plus d'importance dans les sciences et les techniques. Il est même des situations où les simulations numériques remplacent l'expérimentation car une fois bien maitrisées, elles sont moins chères, plus rapides, plus flexibles : elles permettent par exemple d'accéder à des informations difficilement mesurables ou de réaliser un très grand nombre d'essais. Ces méthodes sont utilisées dans la plupart des domaines de la science et il est donc très important d'en avoir un aperçu pour le calcul approché des intégrales mais aussi des dérivées, de l'interpolation polynomiale, des équations différentielles...

Ces techniques ont deux applications principales.

Fonctions explicitées

Calculer une intégrale d'une fonction définie explicitement (par exemple \(x\mapsto\exp(-x^2)\)) revient souvent à chercher la primitive de cette fonction et à prendre la différence entre les valeurs aux bornes de l'intégrale. Il s'agit de l'opération inverse du calcul de la fonction dérivée. Or, si la dérivée d'une fonction définie à partir des fonctions usuelles est toujours calculable explicitement grâce à des formules (comme celle de dérivation des fonctions composées, localement un calcul direct peut être nécessaire, comme pour la dérivée de la fonction \(f\),

\(\displaystyle{f(0)=0,\forall x\neq0f(x)=x\sin(\frac{1}{x})}\)

où en \(0\) on ne peut se contenter d'appliquer les règles "algébriques''), les primitives ne sont pas toujours exprimables à partir des fonctions usuelles. Certaines "classes de fonctions" comme les fractions rationnelles pour lesquelles il existe une méthode générale de calcul font figure d'exception. On connaît des méthodes d'intégration (par parties, par changement de variable ) permettant de calculer l'intégrale de certaines fonctions. Mais il suffit parfois de modifier légèrement l'expression d'une fonction pour ne plus savoir l'intégrer explicitement. Par exemple, on sait que

\(\displaystyle{\int_a^b\sin tdt=\cos a-\cos b}\)

mais on "ne sait pas" donner une formule pour

\(\displaystyle{\int_a^b\frac{\sin t}{t}dt\quad\textrm{ou}\quad\int_a^b\sin t^2dt}\)

Or ces fonctions sont intégrables pour tout intervalle \([a,b]\) (puisqu'elles sont continues ou prolongeables par continuité), il est donc important de savoir sinon calculer du moins approcher l'intégrale. Certaines fonctions sont d'ailleurs définies uniquement comme primitive de fonctions usuelles.

Fonctions non explicitées

Le second intérêt de ces techniques est de calculer l'intégrale d'une fonction qu'on ne connait pas!!! En effet, on sait que l'intégrale est liée à l'aire (algébrique) située sous la courbe représentative de la fonction. Il arrive très souvent qu'on cherche à calculer une telle aire pour une fonction dont on ne connaît la valeur qu'en certains points. C'est notamment le cas lorsque ces valeurs sont obtenues par mesure. Dans une telle situation, on n'a bien entendu pas d'informations sur la fonction entre deux points de mesures puisqu'elle n'est pas observable. On fait alors une hypothèse sur cette fonction pour estimer l'aire correspondant à la fonction entre deux points consécutifs. Bien que la plupart des applications pratiques soient dans ce cadre (fonction connue uniquement en des points discrets), les méthodes sont élaborées pour des fonctions explicites qui permettent de contrôler suivant les propriétés -notamment de régularité- de ces fonctions, les erreurs que l'on commet (sans compter les erreurs de mesures). Sur la base de considération liée à l'expérience, on peut (ou non) faire certaines hypothèses sur la fonction à intégrer et donc utiliser les formules d'estimation d'erreur que l'on va présenter. Nous verrons néanmoins un exemple d'une telle application pour les calculs de distance et de temps de trajet.

Dans la suite, nous supposerons que la fonction \(f\) est intégrable sur l'intervalle \([a, b]\) et dans certains cas nous aurons à la supposer plus régulière (plusieurs fois continûment dérivable. On note

\(\displaystyle{I=\int_a^bf(t)dt}\)