Le continu : les réels
L'ensemble des nombres réels peut être mis en bijection avec un intervalle, par exemple en utilisant la fonction tangente, et deux intervalles quelconques de\(\mathbb R\) peuvent être mis en bijection en utilisant une fonction affine. Il suffit donc de montrer que l'ensemble des réels de l'intervalle \(]0, 1[\) est non dénombrable.
Chaque nombre réel compris entre \(0\) et \(1\) possède un développement décimal illimité ou deux. Les nombres non décimaux en ont un seul, les nombres décimaux possèdent deux développements : Par exemple :
\(0,95 = 0,95000\dots = 0,94999\dots\)
l'un comporte des \(9\) indéfiniment, on l'appelle développement impropre, l'autre, qu'on appelle développement propre, comporte seulement un nombre fini de chiffres non nuls après la virgule. Si on convient de n'utiliser que des développements propres, chaque nombre réel est donc associé à un unique développement propre ; si deux développements propres différent en un chiffre, ils sont les développements de nombres réels distincts.
Non dénombrabilité de l'ensemble des réels
On suppose que les nombres réels de l'intervalle \(]0,1[\) peuvent être rangés en une suite \(A_0, A_1, A_2, \dots,\) et on écrit les développements décimaux propres de ces nombres, (les \(a_{ij}\) sont des chiffres) :
\(A_0 = 0,a_{00}a_{01}a_{02}a_{03}a_{04}\dots\\A_1 = 0,a_{10}a_{11}a_{12}a_{13}a_{14}\dots\\A_2 = 0,a_{20}a_{21}a_{22}a_{23}a_{24}\dots\\ A_3 = 0,a_{30}a_{31}a_{32}a_{33}a_{34}\dots\\\vdots\\ A_n = 0,a_{n0}a_{n1}a_{n2}a_{n3}a_{n4}\dots\\\vdots\)
Le procédé diagonal de Cantor
Le principe de la démonstration est de montrer qu'au moins un nombre réel échappe à ce classement et donc qu'il y a une contradiction. On fabrique un nombre réel \(B\) par un procédé appelé procédé diagonal en prenant \(B = 0,b_0b_1 b_2 b_3\dots\) en imposant \(b_0\neq a_{00},\) \(b_1\neq a_{11},\) \(b_2\neq a_{22},\) etc. et que de plus les \(b_i\) ne soient pas égaux à des 9 indéfiniment.
Comme on ne travaille qu'avec des développements propres, il est sûr que \(B\neq A_0\) car le premier chiffre après la virgule de ces deux nombres diffère, \(B\neq A_1\) car le deuxième chiffre après la virgule de ces deux nombres diffère, \(B\neq A_2\) car le troisième chiffre après la virgule de ces deux nombres diffère, etc. Le nombre \(B\) n'a pas été classé et on a obtenu une contradiction. On ne peut donc pas ranger les nombres réels de l'intervalle \(] 0,1 [\) en une suite. Cet ensemble n'est pas dénombrable. On en déduit immédiatement que l'ensemble des nombres réels\(\mathbb R\) est non dénombrable.
L'ensemble des nombres transcendants
La réunion de deux ensembles dénombrables est dénombrable. Comme l'ensemble des nombres réels est la réunion de l'ensemble des nombres algébriques et de l'ensemble des nombres transcendants, on peut conclure que l'ensemble des nombres transcendants n'est pas dénombrable, sinon l'ensemble \(\mathbb R\)le serait aussi.
Dans l'enseignement au lycée, les étudiants rencontrent quelques nombres transcendants comme \(\pi\) et \(e.\) Implicitement, ils peuvent en tirer l'idée que ces nombres sont peu nombreux et se limitent à quelques nombres exotiques. On voit combien le résultat mathématique est ici loin de l'intuition.