Les cardinaux infinis
Axiome : du choix
Un principe important dans les mathématiques issues des travaux de Cantor est ce qu'on appelle l'axiome du choix qui donne la possibilité de faire une infinité de choix simultanément. En voici l'énoncé :
"Étant donné un ensemble \(E\) et l'ensemble \(F = \color{red}P\color{black}(E)\) de ses parties non vides, on peut définir une application de \(F\) dans \(E\) qui à toute partie non vide de \(E,\) associe un élément de cette partie."
Il y a en mathématiques de nombreux énoncés dont on a montré qu'ils sont équivalents à l'axiome du choix.
Cet axiome permet, si on connaît une surjection \(\rho\) entre \(E\) et \(F,\) d'affirmer qu'on peut, pour chaque élément \(y\) de \(F,\) choisir arbitrairement un antécédent \(x\in\rho^{-1}(\{y\})\) dans \(E\) et ainsi fabriquer une application \(\psi\) de \(F\) dans \(E\) dont on montre qu'elle est injective en utilisant les propriétés des applications étudiées précédemment.
Utiliser une autre relation d'ordre ?
On peut essayer de définir une autre relation d'ordre sur les cardinaux en disant que le cardinal de \(E\) est plus grand que celui de \(F,\) si on peut définir une application surjective \(\rho\) de \(E\) sur \(F.\)
L'axiome du choix permet de montrer qu'alors il existe une injection \(\psi\) de \(F\) dans \(E.\) On n'a donc défini en fait qu'une seule relation d'ordre sur les cardinaux.
On montre que si la théorie des ensembles est non contradictoire, elle le reste si on lui adjoint l'axiome du choix (résultat démontré par Gödel en 1940), elle le reste aussi si on adopte la négation de l'axiome du choix (Cohen, 1963), ce qui signifie que cet axiome est indépendant des autres axiomes de la théorie des ensembles.
Théorème : de Cantor
Cantor a établit le théorème suivant :
Pour tout ensemble \(E,\) le cardinal de l'ensemble \(\color{red}P\color{black}(E)\) des parties de \(E\) est strictement supérieur au cardinal de \(E.\)
On en fait une démonstration par l'absurde en supposant une application surjective \(f\) de \(E\) sur \(\color{red}P\color{black}(E),\) et on considère l'ensemble \(A\) :
\(A = \{x\in E~ |~ x\notin f(x)\}\)
Cet ensemble \(A\) est l'image d'un élément \(a\) de \(E\) par l'application \(f.\) On constate alors que les deux assertions, \(a\in A\) et \(a\notin A\) sont impossibles. On a donc une contradiction, ce qui démontre qu'il n'existe pas de surjection d'un ensemble sur l'ensemble de ses parties.
Infinité de cardinaux
Le théorème de Cantor montre l'existence d'une infinité de cardinaux, puisque pour tout cardinal \(e,\) on peut en trouver un strictement plus grand, celui de l'ensemble de ses parties que nous noterons \(2^e.\)
Cette notation s'explique, car à tout sous ensemble \(F\) d'un ensemble \(E,\) on peut associer une application de \(E\) dans l'ensemble \(\{0, 1\}\) en prenant la fonction caractéristique de \(F.\) \(\color{red}P\color{black}(E)\) peut donc être mis en bijection avec l'ensemble des fonctions de \(E\) à valeur dans \(\{0, 1\},\) ensemble noté \(\{0, 1\}^E.\)
On désigne par \(c\) le cardinal de\(\mathbb R\) et par \(\mathcal N_0\) le cardinal de \(\mathbb N.\) On a vu que \(\mathcal N_0 < c\) car \(\mathbb R\)n'est pas dénombrable.
Comparaison des cardinaux \(2^{\mathcal N_0}\)et \(c\)
On va montrer la relation \(2^{\mathcal N_0}= c\) en montrant une double inégalité :
Si à tout nombre compris entre \(0\) et \(1,\) on associe son développement dyadique (propre), (c'est-à-dire son développement en base \(2),\)
on obtient une injection de \([0, 1[\) dans \(\{0, 1\}^{\mathbb N}\) et donc \(c\leq2^{\mathcal N_0} .\)
Si à toute suite infinie d'éléments de \(\{0, 1\},\) on associe un nombre entre \(0\) et \(1\) qui admet cette suite comme développement triadique, (c'est-à-dire son développement en base \(3),\) on obtient une injection de \(\{0, 1\}^{\mathbb N}\) dans \([0, 1[\) et donc \(2^{\mathcal N_0}\leq c.\)
L'hypothèse du continu
On peut se demander s'il existe des cardinaux compris entre \(\mathcal N_0\) et \(c.\)
L'affirmation "Il n'existe pas de cardinal strictement compris entre \(\mathcal N_0\) et \(c."\) est un axiome qui s'appelle l'hypothèse du continu.
On peut généraliser :
L'affirmation "Pour tout cardinal infini \(e,\) il n'existe pas de cardinal strictement compris entre \(e\) et \(2^e."\) est un axiome qui s'appelle l'hypothèse généralisée du continu.
Gödel et Cohen ont aussi montré que cet axiome était indépendant des autres axiomes de la théorie des ensembles.