Exemples

1. L'introduction prouve que, quel que soit le corps \(K\), un polynôme de degré 1 est irréductible sur \(K\).

2. Le polynôme \(X^2+1\) considéré comme élément de \(R[X]\) est irréductible sur \(R\).

En effet s'il ne l'était pas, il admettrait un diviseur non constant, donc de degré supérieur ou égal à 1, et différent d'un polynôme de la forme \(\lambda(X^2+1)\), donc de degré inférieur ou égal à 1. Cela prouve qu'il admettrait un diviseur de degré exactement égal à 1.

Donc il existerait deux polynômes, que l'on peut choisir unitaires d'après la remarque précédente, appartenant à \(R[X]\), \(P\) de degré 1 et \(Q\) tels que \(X^2+1=p(X)Q(X)\). La formule donnant le degré d'un produit permet d'affirmer que \(Q\) est aussi de degré égal à 1. Donc il existerait des réels a, et b tels que

\(\begin{array}{ccc}X^2+1&=&(X+a)(X+b)\\&=&X^2+(a+b)X+ab\end{array}\)

Les réels a et b vérifieraient les relations :

\(a+b=0\)

\(ab=1\)

soit

\(a=-b\)

\(b^2=-1\)

Or il n'existe pas de réel dont le carré soit égal à –1. Donc le polynôme \(X^2+1\) ne peut pas être factorisable dans \(R[X]\). Il est donc irréductible dans \(R[X]\).

Remarque

La démonstration de l'irréductibilité du polynôme \(X^2+1\) est plus simple si l'on a la notion de racine d'un polynôme. La démonstration présentée ici tient compte du fait que cette ressource ne suppose pas connue la notion de racine.

3. Le même polynôme \(X^2+1\) considéré comme élément de \(C[X]\) n'est pas irréductible sur \(C\) : en effet on a l'égalité : \(X^2+1=(X+i)(X-i)\).

Remarque

Les polynômes \(X+i\) et \(X-i\) sont des éléments de \(C[X]\) mais pas de \(R[X]\).

4. Le polynôme \(X^2-2\) peut être considéré comme un élément de \(Q[X]\), de \(R[X]\)

et de \(C[X]\). On étudie sur chacun des corps son caractère irréductible ou non irréductible.

  • Sur Q : Il est irréductible. En effet avec les mêmes considérations de degré que dans l'exemple 2., s'il n'est pas irréductible, il admet deux diviseurs de degré 1 et peut donc s'écrire : \(X^2-2=(X+a)(X+b)\), soit encore \(X^2-2=X^2+(b+a)X+ab)\), avec a et b éléments de Q. Alors on a les égalités :

    \(a+b=0\)

    \(ab=-2\)

    soit

    \(a=-b\)

    \(b^2=2\)

    donc nécessairement on aurait : \(b^2=2\) avec b rationnel.

    Cette égalité prouverait que \(\sqrt2\) appartient à \(Q\) ; or l'on sait que ceci est faux (pour en voir une démonstration, cliquez), donc l'hypothèse \(X^2-2\) polynôme réductible sur \(Q\) est absurde.

Démonstrationde l'irrationalité de la racine carrée de 2

Une des propriétés des nombres premiers, utilisée de manière forte dans la preuve, est la suivante : si un nombre premier ne divise pas un entier, il est premier avec lui.

On fait une démonstration par l'absurde.

Supposons donc que \(\sqrt2\) appartienne à \(Q\). Cela peut se traduire par l'existence de deux entiers (positifs) premiers entre eux, p et q tels que \(\sqrt2=\frac pq\). Cette égalité équivaut à \(2q^2=p^2\). Un raisonnement arithmétique permet de conclure de la manière suivante : 2 divise évidemment \(2q^2\), donc aussi \(p^2\).

Supposons que 2 ne divise pas p. Il est donc premier avec p. Alors, d'après le théorème de Gauss, comme il divise \(p^2\), il divise p et l'on a une contradiction.

Donc 2 divise p et il existe un entier r tel que \(p=2r\). De l'égalité \(2q^2=p^2\), on déduit : \(2r^2=q^2\). Une démonstration analogue prouve qu'alors 2 divise q. Or ceci est contraire à l'hypothèse : p et q sont premiers entre eux.

  • Sur R et C : On a immédiatement l'égalité \(X^2-2=(X-\sqrt2)(X+\sqrt2)\).

    Comme \(X-\sqrt2\) et \(X+\sqrt2\) sont des éléments de \(R[X]\) et à fortiori de \(C[X]\), le polynôme \(X^2-2\) n'est irréductible ni sur \(R\) ni sur \(C\).

Remarque

Il est clair que la démonstration de l'irréductibilité de \(X^2-2\) sur \(Q\) a porté essentiellement sur le fait que, \(\sqrt2\) n'appartenant pas à \(Q\), on ne pouvait pas factoriser \(X^2-2\) en produit de polynômes à coefficients dans \(Q\), argument qui n'est évidemment plus valable dans \(R\) ou à fortiori dans \(C\).