Construction et caractérisation

ThéorèmeConstruction d'une application linéaire définie sur un espace vectoriel de type fini

Soient \(E\) et \(F\) deux espaces vectoriels sur un même corps \(\mathbf K\).

On suppose que l'espace vectoriel \(E\) est de type fini. Soit \(n\) \((n \ge 1)\) sa dimension.

Alors, si \((e_1, e_2, ...,e_n )\) est une base de\( E\), pour tout \(n\textrm{-uplet}\) \((a_1, a_2, ..., a_n)\) d'éléments de \(F\), il existe une et une seule application linéaire \(f\) de \(E\) dans \(F\) telle que pour tout entier\( i\) compris entre \(1\) et \(n\) :

\(f(e_i) = a_i\)

Commentaire à propos de cet énoncé

Il n'est pas nécessaire de faire une hypothèse sur la dimension de l'espace vectoriel \(F\), espace vectoriel d'arrivée de \(f\).

Ce théorème a pour conséquence immédiate la propriété suivante :

PropriétéCaractérisation d'une application linéaire définie sur un espace vectoriel de type fini

Une application linéaire d'un espace vectoriel de type fini dans un espace vectoriel quelconque est entièrement déterminée par les images des vecteurs d'une base de l'espace vectoriel de départ.

MéthodeMéthodologie de la preuve du théorème

La conclusion du théorème comporte deux points : l'existence et l'unicité d'une application linéaire satisfaisant à certaines propriétés.

La démonstration va donc comporter deux parties :

  • une première qui consistera à prouver que si une telle application existe, elle est unique ;

  • la deuxième qui consistera à montrer l'existence d'une telle application linéaire par sa construction explicite.

Il peut paraître curieux de commencer par l'unicité, mais la plupart du temps, dans une situation de ce type, c'est ce qui est fait. Cela permet en effet de déterminer, si elle existe, la seule application qui peut convenir.

PreuvePreuve du théorème

Unicité :

Soit un \(n\textrm{-uplet}\) \((a_1, a_2, ..., a_n)\) quelconque d'éléments de \(F\). Soient deux applications linéaires \(f\) et \(g\) de \(E\) dans \(F\) satisfaisant à la condition imposée, c'est-à-dire telles que :

\(\forall i \in N, 1 \le i \le n, f(e_i) = a_i\) et \(g(e_i) = a_i\)

Le but de la démonstration est de prouver que \(f\) et \(g\) sont égales autrement dit que

\(\forall x \in E, f(x) = g(x)\)

Compte tenu de la définition d'une base d'un espace vectoriel, tout élément de \(E\) s'écrit de manière unique sous la forme d'une combinaison linéaire des vecteurs d'une base.

Donc, pour tout \(x\) de \(E\), il existe des scalaires \(x_1, x_2, ..., x_n\), uniques tels que

\(\displaystyle{\sum_{i=1}^{i = n} x_i e_i}\)

Alors comme \(f\) et \(g\) sont des applications linéaires,

\(f(x) = \displaystyle{ \sum_{i=1}^{i = n} x_i f(e_i)}\), \(g(x) = \displaystyle{ \sum_{i=1}^{i = n} x_i g(e_i)}\)

Comme d'après les hypothèses, \(\forall i \in N, 1 \le i \le n, f(e_i) = a_i\) et \(g(e_i) = a_i\),

cela donne \(f(x) = \displaystyle{ \sum_{i=1}^{i = n} x_i a_i = g(x)}\) ce qui achève la démonstration.

Existence :

L'observation du résultat précédent permet d'affirmer que la seule solution possible au problème posé est l'application

\(x \longmapsto \displaystyle{ \sum_{i=1}^{i = n} x_i a_i }\) si \(x = \displaystyle{ \sum_{i=1}^{i = n} x_i e_i}\).

Soit \(L\) cette application (cela en est bien une du fait de l'unicité des composantes d'un vecteur sur une base). Pour achever la démonstration il s'agit de vérifier que cette application est linéaire et qu'elle vérifie la condition imposée, à savoir \(\forall i \in N, 1 \le i \le n, L(e_i) = a_i\).

Soient \(x = \displaystyle{ \sum_{i=1}^{i = n} x_i e_i}\) et \(y = \displaystyle{ \sum_{i=1}^{i = n} y_i e_i}\) deux éléments de \(E\), et \(\alpha\) et \(\beta\) deux scalaires. Alors, tous calculs faits, cela donne \(\alpha x + \beta y = \displaystyle{ \sum_{i=1}^{i = n} (\alpha x_i + \beta y_i)e_i}\) et les scalaires \(\alpha x_i + \beta y_i\) sont les composantes de \(\alpha x + \beta y\) sur la base \(e_1, e_2, ..., e_n\).

Donc d'après la définition de \(L\), on a \(L(\alpha x + \beta y) = \displaystyle{ \alpha \sum_{i=1}^{i = n} x_i a_i + \beta \sum_{i=1}^{i = n} y_i a_i}\),

c'est-à-dire \(L(\alpha x + \beta y) = \alpha L(x) + \beta L(y)\). L'application \(L\) est donc linéaire.

Pour justifier qu'elle vérifie la condition imposée, il suffit de remarquer que la \(i\textrm{-\`eme}\) composante de \(e_i\) sur la base \(( e_1, e_2, ... ,e_n)\) est égale à \(1\) et que toutes les autres sont nulles.

Alors \(L(e_i) = 1 a_i + \displaystyle{ \sum_{j=1_{j \ne i}}^{j = n} 0 a_j = a_i}\) ce qui termine la preuve.