Benzènes substitués

L'étude du benzène s'ouvre sur une déconvenue importante en RMN du \(\textrm{}^{13}\textrm C\). Le déplacement chimique (un seul signal du à l'isochronie des 6 carbones) se trouve à 128.5 ppm ce qui est très proche de celui de l'éthylène (123.5 ppm). Les effets de substituants y sont moins marqués que dans l'éthylène du fait de la répartition par la conjugaison des effets sur plusieurs carbones, si bien que la plage de résonance des carbones benzéniques est totalement confondue avec celle des éthyléniques. Cette perte de performance est heureusement palliée par la RMN du proton qui prévaut en matière de détermination des structures des composés aromatiques.

Le calcul proposé pour les valeurs des déplacements chimiques des carbones aromatiques est basé en RMN du \(\textrm{}^{13}\textrm C\) sur une série d'incréments obtenus par la différences entre les déplacements chimiques pour une série de benzènes monosubstitués et le déplacement chimique des carbones du benzène non substitué (soit 128.5, ppm). Les carbones à prendre en compte sont de quatre types : celui qui porte le substituant ou carbone ipso, les deux carbones (identiques pour une mono-substitution) en ortho, les deux carbones en méta (identiques pour une mono-substitution) et le carbone para.

Il va de soit que pour un composé monosubstitué et pour le même substituant, ces incréments sont plus que fiables, puisque qu'ils proviennent des données relevées sur le spectre expérimental du composé monosubstitué ! Ils restent valables pour des substituants voisins ou homologues.

L'efficacité est également maintenue dans de nombreux cas pour une disubstitution, voire une tri-substitution, moins dans les conditions suivantes :

  • substituants volumineux en ortho ce qui perturbe fortement la planéité de chaque groupe et modifie ses effets électroniques et stériques,

  • substituants en ortho et para ayant des effets très antagonistes (attracteur/donneur) qui vont conduire à une exaltation des incréments...

La formule de calcul est : \(\delta i = 128\textrm,5 + \Delta\delta i\)

Substituant

\(\Delta\delta~\mathrm{C~ipso}\)

\(\Delta\delta~\mathrm{C~ortho}\)

\(\Delta\delta~\mathrm{C~meta}\)

\(\Delta\delta~\mathrm{C~para}\)

\(\mathrm{-CH_3}\)

9.2

0.7

-0.1

-3.1

\(\mathrm{-CH_2-CH_3}\)

15.6

-0.5

0

-2.7

\(\mathrm{-CH(CH_3)_2}\)

20.1

-2.0

0

-2.5

\(\mathrm{-C(CH_3)_3}\)

22.1

-3.4

-0.4

-3.1

\(\mathrm{-CH_2-CN}\)

1.7

0.5

-0.8

-0.7

\(\mathrm{-CH_2COCH_3}\)

6.0

1.0

0.2

-1.6

\(\mathrm{-CH_2NH_2}\)

14.9

1.4

-0.1

-1.9

\(\mathrm{-CH_2OH}\)

12.4

-1.2

0.2

-1.1

\(\mathrm{-CH_2OCH_3}\)

11.0

0.5

-0.4

-0.5

\(\mathrm{-OH}\)

26.9

-12.8

1.4

-7.4

\(\mathrm{OCH_3}\)

31.9

-14.4

1.0

-7.7

\(\mathrm{OCOCH_3}\)

22.4

-7.1

0.4

-3.2

\(\mathrm{-NH_2}\)

18.2

-13.4

0.8

-10

\(\mathrm{-N(CH_3)_2}\)

22.5

-15.4

0.9

-11.5

\(\mathrm{-NHCOCH_3}\)

9.7

-8.1

0.2

-4.4

\(\mathrm{F}\)

34.8

-13.0

1.6

-4.4

\(\mathrm{Cl}\)

6.3

0.4

1.4

-1.9

\(\mathrm{Br}\)

5.8

3.2

1.6

-1.6

\(\mathrm{I}\)

-34.1

8.9

1.6

-1.1

\(\mathrm{-CF_3}\)

2.5

-3.2

0.3

3.3

\(\mathrm{-CN}\)

-15.7

3.6

0.7

4.3

\(\mathrm{-NO_2}\)

19.9

-4.9

0.9

6.1

\(\mathrm{-COH}\)

8.4

1.2

0.5

5.7

\(\mathrm{-COCH_3}\)

8.9

0.0

-0.1

4.4

\(\mathrm{-COC_6H_5}\)

9.3

1.6

-0.3

3.7

\(\mathrm{-CONH_2}\)

5.0

-1.2

0.1

3.4

\(\mathrm{-COOH}\)

2.1

1.6

-0.1

5.2

\(\mathrm{-COOCH_3}\)

3.0

1.2

-0.1

4.3

\(\mathrm{-COOCH_2CH_3}\)

2.1

1.0

-0.5

3.9

Quelques commentaires :

  • Pour le carbone ipso (carbone porteur du substituant), les incréments sont assez voisins de ceux décrits et commentés pour les éthyléniques (effet \(\alpha\)), nous n'y reviendrons pas. L'effet est généralement déblindant, assez important avec des substituants attracteurs ou encombrants. Les blindages sont rares et associés aux gros atomes et aux triples liaisons.

  • En ortho , il est difficile de trouver un comportement directeur car trois contributios se combinent : les effets inductifs, les effets conjugatifs et les effets stériques. Seuls les substituants présentant un caractère dominant peuvent être commentés. Ainsi pour \(\textrm F\), \(\textrm{OH}\), \(\textrm{NH}_2\), présentant peu d'effet stérique, l'effet dominant est l'effet donneur (qui masque l'effet inductif ) on observe des blindages importants. La situation inverse que l'on pouvait attendre pour \(\textrm{NO}_2\) ou \(\textrm{CHO}\) n'est pas observée !

  • Les carbones métas semblent peu concernés, les effets y sont en moyenne assez faibles, puisque loin des effets stériques et inductifs, et non concernés par les effets de conjugaison. On ne dépasse 1 ppm que pour des substituants « extrêmes » tel \(\textrm F\), \(\textrm{OH}\), \(\textrm{NO}_2\) ou les gros atomes. On retiendra que les carbones en méta ne sont pas affectés par la substitution.

  • Enfin, en para, seul l'effet conjugatif va maintenir des effets appréciables. Ainsi les substituants donneurs comme \(\textrm F\), \(\textrm{OH}\), \(\textrm{NH}_2\) sont toujours blindants alors que les substituants accepteurs comme \(\textrm{NO}_2\) ou \(\textrm{CHO}\) sont déblindants. Libérés des problèmes d'effet stérique sur les déplacements chimiques on retrouve en para une logique simple que traduit bien la réactivité des carbones para vis à vis de la substitution électrophile .

A partir de ces données, nous avons construit un simulateur. Cliquez sur le bouton radio correspondant au substituant et observez les déplacements chimiques des différents carbones du noyau armatique

Benzènes polysubstitués

Reste enfin à envisager le présence de plusieurs substituants. Nous avons tenté de calculer les déplacements chimiques des composés aromatiques diversement substitués en additionnant les effets observés pour chaque substituant dans le cadre de la mono-substitution. L'efficacité n'est en aucun cas garantie a priori, dans la mesure où certain effets peuvent se contrarier, ou se modifier, en particulier pour des substitutions sur des carbones voisins (en ortho) dans lesquelles des effets stériques peuvent modifier la géométrie du substituant et donc en modifier les effets sur les différents atomes

Nous avons réalisé un simulateur sur cette base et l'avons testé sur des exercices que nous vous conseillons de faire en complément de cet enseignement. Il apparaît une suffisamment bonne efficacité, pour faire de ce simulateur un outil d'attribution des différents carbones aromatiques. Il doit rester présent à l'esprit que dans l'hypothèse d'une très grande similarité des déplacements chimiques ce simulateur sera inefficace, mais le fait d'observer des déplacements chimiques voisins est en soit une information importante, l'attribution précise s'inscrivant dans une démarche plus fouillée mais pas nécessairement fondamentale pour l'élucidation structurale.

Pour utiliser ce simulteur, choisissez d'abord la position de votre substituant sur le cycle en cliquant sur le boton radio correspondant puis choisissez ensuite le substituant. recommencez pour les autres substitutions